LES
FONDATEURS ET LEUR SOCIETE : KOEHLER-ESCOFFIER
Jules,
Ernest Escoffier est
né le 8 octobre 1881 au 50, cours de Saint-André (aujourd’hui Cours Jaurès) à
Grenoble, de l’union entre Jules
ESCOFFIER 26 ans, (mécanicien) et
de Marie-Angeline POIDEBARD
(lingère).
En 1901, nous le retrouvons comme mécanicien
dans la manufacture de motocyclettes
Magnat & Debon (au début, constructeur de cycles), au 59, Cours de
St-André oú son père est employé.
Dés 1902, à 21 ans il est pilote officiel de
Magnat & Debon et dispute le kilomètre lancé à Deauville et collectionne un
beau palmarès dans les courses de cotes, les épreuves de régularité, telles que
le concours de tourisme ou le circuit du Rhone organisés par le Moto-club de
Lyon.
En 1905, la famille ESCOFFIER habite au 71,
cours de Saint-André, juste au-dessus du magasin Magnat & Debon.
Jules Escoffier (fils),
devient mécanicien et metteur au point, à partir de 1909 ensemble aux cotés d'Arthur
MOSER.
Il restera pendant dix ans dans cette
fonction (étant metteur au point de tout les progrès mécaniques et mises au
point réussies qui font gagner),
jusqu'à l’arrivé en 1909 du Suisse Arthur MOSER (lié au
constructeur des moteurs du même nom), aux cotés des MM. MAGNAT et DEBON.
Puis Jules
ESCOFFIER (fils), s'installe à Lyon en 1905 comme agent Magnat & Debon,
oú il sera un membre éminant du Moto-Club de Lyon.
Il épouse le 19 octobre 1907 Mlle Louise, Augustine, PRAS (âgée de 17 ans), à
Vaulnavey-le-Haut, en pays Vizillois. Cette jeune fille se trouve être la nièce
de M. Joseph MAGNAT, son employeur. Elle est une parente de Mme défunte Aveline
MAGNAT née BISESTY.
En 1911, DEBON quitte la société et les
pouvoirs de MOSER augmentent si bien que Jules ESCOFFIER doit partager la conception des nouveaux
modèles.
Il vit mal les changements et quitte le constructeur Grenoblois pour
s’installer à Lyon comme Agent – Mécanicien de Magnat-Debon et créé sa propre société sous son nom.
Il sort alorssa première motocyclette dont la partie cycle est une Magnat &
Debon
En 1912,
là il peut exercer pleinement ces talents de metteur au point sur les
motos de ses clients, entre autre celle d’un certain Marcel KOEHLER qui vient de terminer de brillantes études d’ingénieur à l’école
centrale Lyonnaise, tout en préparant une licence de physique industrielle à la
faculté des sciences.
Ce dernier est
aussi un pilote habile et rapide, capable de juger les qualités et les défauts d’une moto.
Marcel
KOEHLER, ingénieur et
industriel lyonnais est le fils de René KOEHLER, docteur en médecine et
océanographe à Monaco (qui accompagne le prince Albert I de Monaco dans ses
premières croisières océanographiques et participe à la création du musée
océanographique), et de Jeanne LUMIERES, fille d'Antoine et soeur de
Louis et Auguste LUMIERES, les inventeurs de la photographies couleur
(autochrome) et du cinématographe.
On notera que
pour leurs appareils Louis et Auguste utiliseront des lampes spéciales photos
et des porcelaines qu'ils feront fabriquer en 1895 par les Etablissements
Grammont de Lyon et de Givors.
Ces établissements sont ceux de créés par Léonard GRAMMONT ayant eut pour
successeur Etienne-Claude (fils), puis Alexandre (fils).
Ce dernier
aura pour fils un certain Edouard GRAMMONT dit « Teddy ».
Grâce Mme
Margueritte PETIT dit « Poucette » et Alexandre PETIT-GRAMMONT, nous
savons que les familles KOEHLER et LUMIERES sont des habitués de la villa de Pont de Cheruy
dite la "Grammonière" pour des agappes.
Marcel
KOEHLER et Edouard
GRAMMONT sont donc des amis d'enfance
et ce dernier va devenir un nom qui va compter pour la maison KOEHLER-ESCOFFIER
sous le pseudonyme... d'EDDOURA.
Le 1er
novembre 1912, Marcel
KOEHLER et Jules ESCOFFIER s'associent pour créer la maison KOEHLER-ESCOFFIER,
30 Avenue de Noailles à Lyon (69) , et ayant pour objet : « La
fabrication et le commerce de motocyclettes et tout ce qui s’y rattache »,
avec un capital initialement versé de 30.000,00 F, apportés pour la moitié par Marcel
KOEHLER en espèces, et pour l’autre moitié par Jules ESCOFFIER
sous forme d’un fonds de commerce de « fabricant de
motocyclettes » qu’il possède et exploite au 30, Avenue de Noailles (aujourd’hui Avenue
Foch).
Etant donné que Marcel KOEHLER est encore mineur (il n’a que 20 ans), il a doit se
faire émanciper le 24 octobre 1912 devant le juge de paix de Villeurbanne.
L’acte de
fondation prevoit le départ de Marcel KOEHLER sous les drapeaux et
stipule que pendant cette période il devra payer de ses deniers un employé pour
le remplacer au sein de la societé.
Selon l’acte
de création de la societé KOEHLER-ESCOFFIER, Jules ESCOFFIER
était déjà : « Fabricant de motocyclettes » avant la naissance
de la marque et il est absolument certain qu’il fabriquait déjà la 500 bicylindre en V à
culbuteurs « La Mandoline », bien avant la fondation de la
societé, puisque la nouvelle machine , annoncée le 11 aout au Mont-Ventoux, débute quelques semaines
plus tard au Mont-Verdun avec un double signé KOEHLER-ESCOFFIER.
Le 23 avril
1914, Jules ESCOFFIER
malade, décède.
En août
1914 commence la
première guerre mondiale, Marcel
KOEHLER est mobilisé et la jeune société totalement orpheline perds ses
deux fondateurs.
Envoyé en
Russie à Petrograd, il obtiendra bientot son brevet de pilote en 1915 et là il fera office d’instructeur et de pilote
d’essai des avions équipés de moteurs Renault, fabriqués sur place chez l'usine Renault Aviation.
NOUVEAU
DEPART DE LA SOCIETE KOEHLER-ESCOFFIER
EN 1924
En 1919
après la démobilisation, Marcel KOEHLER a réussit à éviter tout accident et retourne à Lyon.
Pendant cette brève periode qu’il passe Lyon, il vend
en accord avec la veuve de Jules ESCOFFIER la societé KOEHLER-ESCOFFIER
à un dénommé DARIER (dirigeant du moto-club de Lyon), qui la revend
presque aussitot à Raymond GUIGUET (ingénieur) et un autre sociétaire du
Moto-club de Lyon .
Celui-ci, né en 1891 est un excellent pilote qui
court pour ORIAL ( Office de Représentations Industrielles
et Automobiles Lyonnais).
Son palmarès
bien riche mentionne : en 1921 des
victoires au GP de Lyon, au Mont Ventoux et au GP de France en 1921 et 1922.
Loin d'etre un
homme fortuné Raymond GUIGUET, n'a pas les moyens pour construire des
motocyclettes et dans ce but il entre en 1922, dans une societé fondé par MM. Victor
GRAYDON, PERRAS et CARTET ou il remplace le dernier
actionnaire, CARTET.
Son apport
dans cette societé se limite à la construction des motocyclettes KOEHLER-ESCOFFIER,
et aussitot il propose a ses associés de reprendre la construction des « Mandolines », maintenant modernisées avec des boites
à 3 vitesses Sturmey Archer et une transmission finale à chaine dans une petite
usine (propriété de la societé) à 63, route du Crémieu à Villeurbanne.
Là, Raymond GUIGUET fit évoluer la
« Mandoline ». Il développe une version « Sport » à culasse
hémisphérique et soupapes en V, nouveau reservoir et des nouveaux échappements.
>Cette moto
atteint 25 ch à 4.000 tours, roule 130 km/h mais à encore une mécanique fragile.
Pourtant elle emporte le GP de Marseille en 1922.
Raymond GUIGUET qui ne pense qu’à la course,
dépense plus d'argent que la societé (pourtant bien gérée par Victor GRAYDON), peut en gagner. La situation se
dégrade alors rapidement jusqu'au moment
oú en 1923 pendant le GP de l'UMF à Tours, les deux 500cc KOEHLER-ESCOFFIER
« Sport » cassent leur moteurs dans le premier tour de l'épreuve.
Victor GRAYDON, qui début 1924 pense avoir trouvé la solution dans la
location, avec une promesse de vente, de son établissement de la route de
Cremieu à une societé nouvellement créée, la SAM. ( Societé Anonyme
de Motocyclettes) avec un capital de 750.000 francs.
Mais derrière
la SAM, il y est encore Raymond GUIGUET, qui a persuadé un des dirigeants de l’ORIAL, M. DREVET
a investir gros dans la marque KOEHLER-ESCOFFIER.
Celui-ci comprend
bien vite qu’il gagnera pas un sou avec la SAM et se retire en 1926,
laissant Raymond GUIGUET comme
seul actionnaire de la SAM.
Raymond GUIGUET, avec ses excellents talents d’ingénieur-mecanicien,
moins comme gestionnaire, sait alors qu’il a obtenu le maximum possible de la
500 bi-cylindre en V culbuté, déjà agé de 14 ans.
Dés septembre 1923, les limites étaient atteintes, bien spéctaculaires
d’ailleurs, puisque qu’une 600 Mandoline Sport side-car avait emporté la
victoire sur le kilometre lancé lors de la journée de records du Moto-club de
Lyon avec une vitesse de 122 km/h.
Pour rester victorieuse, il faudrait un nouveau moteur et
en 1926, Raymond GUIGUET
se met au travail et conçoit un 500cc, monocylindre à arbres à cames en
tête et double échappements, qui par son dessin spécifique, peut devenir, avec
un minimum de modifications, un 1000cc bicylindre en V.
En dépit de la conception principale, la 500 mono ne sera pas prête la
première, car Raymond GUIGUET tenaillé par la compétition, achève
d’abord la 1000cc, avec un succes éclatant :
Le 12 juin 1927, pour son début, deuxième temps à la course de cote de
Limonest, et le meilleur temps une semaine plus tard à la cote de
Planfoy, au-dessus de St-Etienne.
Elle est piloté à ces occasions par EDDOURA, qui au guidon d’une KOEHLER-ESCOFFIER
est tout simplement imbattable.
La 500cc, atteint pas le même interet que la 1000cc par
faute de moyens, et ce malgré que le dessin du moteur soit le même. La
production des motos de série est très médiocre.
Les pièces de
la distribution tournent acier sur acier sans graissage suffisant et l’emploi
des machines-outils imprécises et fatiguées
pour la production, provoque
toutes manquent de fiabilité.
Il suit de cela que les ventes restent très faibles, malgré les succès
répétés de la 1000cc.
Les chiffres en disent plus long : six ou sept
1000cc et moins de cent 500cc, sont construites après deux ans au catalogue.
Fin 1928, la situation financière de Raymond GUIGUET
est donc désastreuse et la marque sera sauvée, par un changement des règlements de L’UMF,
concernant le championnat de France.
LA
SOCIETE KOEHLER-ESCOFFIER SAUVEE PAR
MONET-GOYON
Jusqu’en 1927 inclus, ce championnat de France était ouvert à toutes
machines, quelle qu’en soit la nationalité.
A partir de 1928, ce championnat fut ouvert qu’aux
machines de construction entièrement Françaises, ce qui écartait du championnat
toutes MONET-GOYON, équipées de moteurs Villiers Anglais (pour leur
175cc) et des moteurs MAG Suisses (pour les grosses cubes).
MONET-GOYON, très attaché au championnat national (qu’il avait remporté chaque année depuis 1924), pour y participer à nouveau,
devait se conformer au règlement et monter des moteurs Français.
MONET-GOYON sait qu’il n’a pas le temps pour
construire un nouveau moteur puissant et fiable. Quand au moteurs exixtants
capables de gagner, il y en a très peu et il est impossible de s’en procurer
chez les grands constructeurs concurrents.
La solution est donc l’achat de la societé SAM,
dont Raymond GUIGUET est le seul
patron. L’affaire se conclut courant 1929, d’une manière pas très
favorable pour Victor GRAYDON, qui doit l’exécuter à un prix tres bas,
la promesse de vente de 1924.
Pour l’ancien locataire Raymond GUIGUET, ce passage chez MONET-GOYON
fut très profitable car il n’avait qu’un
seul mandat, c’est de développer la 500cc pour gagner le championnat de France
1930.
MONET-GOYON installa un service de course à
Charnay-les-Macon, à deux kilomètres de l’usine, avec un banc de puissance et
les meilleures machines outils et
ouvriers tourneurs fraiseurs. La 500cc
de course y sera alors construite dans les meilleures conditions.
Partant de la 500cc de serie, Raymond GUIGUET renforça tout.
Les carters sont renforcés et nervurés ou mêmes blindés
par de la tole d’acier. La queue de vilebrequin et maneton sont
surdimensionnés. Un graissage sophistiqué à carter sec est installé, la
distribution est intégralement montée sur aiguilles et /ou roulements ou butées
à billes. Une nouvelle culasse avec ressorts de soupapes en épingle et un
simple échappement sont également montés.
Pour le problème de la boite, MONET-GOYON obtient
par BAYARD-CLEMENT la licence des boites anglaises réputées
« Sturmey Archer » (mais seulement pour les boites à commande
à main, pas pour la boite à commande à pied) .
Cela ne posera pas de problèmes, car la course se
deroulera à Montlhéry, sur un parcours oú les changements de vitesse sont peu
nombreux.
Cette boite, nommée « La Macérienne » pour
cause de l’implantation des usines BAYARD-CLEMENT à
Charleville-Mezières, fut livrée bien à temps pour équiper les deux 500cc de
course et fut testé sur la route par
les deux pilotes de course de MONET-GOYON : Marcel CHATEAU et DURAND dans les mois avant l’épreuve
de Monthlery.
Pour le championnat de France 1930, Raymond GUIGUET
avait préparée les deux KE 500cc
d’une manière differente, parce que les essais sur la route avaient soulevé que
malgré le poids faible de la partie roulante et des roues de 21 pouces
(chaussées de pneus étroits), la vitesse de pointe était un peu
« juste » pour avoir une chance de se battre contre les deux Jonghi
350cc de JEANNIN et LEMOINE (pseudo de Georges MONNERET à
l’époque) et la Alcyon 350cc de LEMASSON.
Pour partager les chances on decide de régler la 500cc de DURAND avec une distribution
très croisée et une vitesse de pointe élevée
et la 500cc de Marcel CHATEAU avec une distribution plus calme et
une vitesse de pointe moins élevée.
Ces prévisions de Raymond GUIGUET se vérifient le 31 août 1930 à Monthlery. Pendant que
DURAND cassa son moteur très affûté au deuxième tour, Marcel CHATEAU
menait seul une course d’attente, facilitée par des petits ennuis aux 350cm3
dans leurs pointes.
Malgré une vitesse de pointe de 147 km/h, il boucla les
150 km de l’épreuve a une vitesse moyenne de 97 km/h et emporte la victoire et
le titre de Champion de France en catégorie 500cc.
Le premier septembre 1930, à la demande de la presse pour en
savoir les pleines capacités de la machine, Marcel CHATEAU se remettait
en piste sur l’anneau de Monthlery et boucla avec un arbre à cames pointu, un
tour a 162 km/h avant de casser sa bielle.
Raymond GUIGUET
connait très bien les limites de ses
moteurs.
Source : Les motos Françaises (Cent ans d’histoire).
Auteur : Bernard
SALVAT.
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